« Selon l’Insee, la population des 0-19 ans en France métropolitaine est en baisse pour la 4e année consécutive. Mais tous les départements ne sont pas affectés par cette pénurie de jeunes. Certains assistent même à une augmentation ininterrompue depuis 20 ans. »
Tout est parti de cette évolution démographique, en apparence très simple à restituer graphiquement : on s’imagine aisément tracer une courbe de la population totale des 0-19 ans entre 2000 et 2019 puis, pour appréhender les disparités géographiques, dessiner une carte des départements avec en vert ceux dont l’évolution 2000-2019 est positive et en rouge ceux dont l’évolution est négative. Mais en faisant ce choix, nous simplifions les réalités complexes mesurées par l’Insee.
Alors, ne serait-il pas possible de visualiser sur la même image l’évolution sur 20 ans et les disparités géographiques ? Une problématique à laquelle “The Economist” a récemment répondu via un cartogramme des États-Unis qui nous avait tapé dans l’œil. Son principe : attribuer à chaque entité géographique – en l’occurrence, chaque État américain – un carré de taille égale, dans lequel se loge un graphique d’évolution.
L’avantage de cette visualisation est double. D’abord, elle permettrait au lecteur de se replacer simultanément dans le temps et dans l’espace. Elle permettrait ensuite de rendre visible une tendance générale (l’évolution du nombre de jeunes en France) sans sacrifier un niveau de détail supplémentaire (l’évolution du nombre de jeunes par département en France).
Ce format présente toutefois deux difficultés :
1re difficulté :
Il faut que le nombre d’entités à représenter ne soit pas trop grand afin que le cartogramme – et tous les graphiques qu’il contient – reste lisible. Pour
son article, “The Economist” devait représenter les 50 États fédérés des États-Unis, ce qui n’était pas une mince affaire. Or, la France métropolitaine est composée de 96 départements métropolitains*, quasiment le double d’entités à placer sur une visualisation que nous espérons lisible sur mobile… Nous aurions pu nous contenter de représenter
les 13 régions françaises, mais ces dernières manquent cruellement de finesse pour rendre compte des réalités socio-démographiques.
*Pour cette première expérience, les territoires d’outre-mer n’ont pas été inclus.
2e difficulté :
Poser les “carrés-départements” selon leur logique géographique pour qu’un lecteur puisse retrouver son territoire sans plus d’effort que sur une carte classique. C’est ce savant équilibre qui nous a demandé le plus de travail car les départements français n’ont pas été établis selon une grille de géomètre… Il a donc fallu trouver un équilibre entre positionnement géographique réel (nord, sud, est, ouest) et positionnement relatif aux autres départements (la Savoie au nord de la Haute-Savoie, le Haut-Rhin au sud du Bas-Rhin, etc).
Pour lancer la création du puzzle, nous avons apposé une grille de 15 cases de long et de large sur la carte de France, puis nous avons attribué un carré à chaque département dans l’espoir que carré et position géographique réel se recouvrent… On peut toujours rêver !
La carte des départements français oppose plusieurs obstacles à cette belle intention. Si en majorité, ils sont de superficie comparable et doivent donc pouvoir se plier à notre logique rectangulaire, deux exceptions nous ont donné du fil à retordre : l’Île-de-France, dont 7 des 8 départements s’agglutinent sur un espace qui ne dépasse pas la superficie de la Marne, et le Territoire de Belfort. Ce dernier a l’avantage d’être situé en périphérie, son placement peut donc être facilement ajusté. En revanche, les départements d’Île-de-France, placés au cœur, font exploser la grille et il faut donc trouver le moyen de leur offrir plus d’espace sans défigurer complètement la silhouette de l’Hexagone.
Pour résoudre les conflits de placement, nous nous sommes fixés plusieurs objectifs :
1er objectif :
Que les carrés des départements limitrophes soient contigus, en partageant soit un côté soit un angle. Quand la recommandation précédente paraît inapplicable, qu’au moins les départements d’une même région soient contigus.
2e objectif :
Que les carrés des départements maritimes et frontaliers soient situés en périphérie et, à l’inverse, que les autres départements aient bien tous leurs côtés recouverts par un département voisin.
Bien sûr, ces objectifs souffrent au final de quelques exceptions. Dans notre dernière mouture, la Somme n’a qu’un angle découvert pour matérialiser son accès à la mer, le Jura – partageant une petite frontière avec la Suisse – voit ici son accès helvète coupé par le Doubs et la Haute-Savoie, tandis que la Lozère et l’Aveyron sont séparés par la Haute-Loire. Dans cet exercice, il s’agit de limiter au maximum le nombre de ces exceptions.
Laisser respirer ou coller les blocs départements entre eux ?
Coller les blocs implique de marquer fortement les séparations entre départements, créant paradoxalement une continuité entre les graphiques de chaque bloc, pas forcément idéale.
Afficher ou non les limites régionales pour faciliter la lecture ?
Le test des limites régionales ne nous semblait pas concluant, ajoutant de la complexité au visuel. L’affichage des numéros de département nous semble suffisant pour se repérer.
Afficher les axes dans chaque bloc graphique ?
La répétition des axes, à cette échelle, ne nous semble pas nécessaire. Nous avons fait le choix d’afficher une légende qui donne les minimum et maximum sur un seul bloc département qui permet au lecteur de comprendre l’ordre de grandeur des données.
Nous sommes arrivés à un résultat honorable mais sûrement perfectible, aussi nous encourageons les amateurs de casse-tête à s’emparer de notre grille et lui trouver de meilleures alternatives.
Propositions, feedbacks divers et variés, n’hésitez pas à nous écrire !